Qu'est-ce que la Résistance en Moselle annexée et quelles formes a-t-elle prises ? C'est à ces questions que l'historien Cédric Neveu, auteur d'une histoire de la Gestapo en Moselle, tente d'apporter des éléments de réponses au travers d'une vaste étude, d'un essai d'histoire totale sur le groupe « Mario », appellation d'après-guerre qui recouvre le Parti communiste clandestin et son action de 1940 à 1944. Considéré comme l'un des principaux mouvements de lutte contre l'administration nazie au cours de l'annexion, il fut violemment réprimé par le système nazi qui créa pour l'occasion un Kommando spécial de la Gestapo et le SS-Sonderlager de Queuleu où les résistants furent impitoyablement torturés sous l'autorité du brutal commandant Hempen avant d'être envoyés dans les camps de concentration. La figure de son chef, l'instituteur communiste Jean Burger, est bien sûr incontournable mais cette histoire se veut également celle d'un mouvement collectif. En parallèle de l'étude de l'organisation, de l'état-major de la Résistance, des actions opérées (propagande, aide aux prisonniers, actions armées), l'auteur souhaite redonner toute leur place à ces hommes et ces femmes, à ces centaines d'anonymes - dont une forte proportion d'étrangers - qui ont aussi agi. Avec leurs moyens, ils ont contribué à leur niveau, à l'effondrement du système totalitaire destiné à dissoudre l'identité de la Moselle dans le Reich millénaire. 276 d'entre eux le payent de leur vie. Mouvement au coeur de polémiques mémorielles, il est reconnu tardivement par les autorités comme organisation de Résistance. Cette étude, appuyée sur un corpus documentaire impressionnant, appelle à prendre en compte la spécificité de la Résistance en Moselle annexée et à revaloriser la place de ce phénomène collectif de refus dans une historiographie réduisant trop souvent l'histoire des comportements des Français pendant ces années à la collaboration et à la passivité.